Gurtner lutte à armes locales : le fabricant de carburateurs se bat pour résister à la concurrence.
Parmi ses moyens, les logiciels créés par Knowllence.
Le marché de l’automobile et du motocycle n’est pas facile, particulièrement pour les sous-traitants. A eux de mettre en oeuvre tous les moyens pour résister à la pression de l’étranger.
Gurtner a tiré la leçon de la disparition de son client Motobécane dans les années 80 et réagit mieux au départ de Peugeot Motocycles vers la Chine (ER du 6 octobre), en ayant pris d’avance de nouvelles orientations.
Entre autres démarches stratégiques, l’entreprise a choisi des logiciels d’optimisation créés chez Knowllence.
«Aujourd’hui, nous devons anticiper très en amont les besoins des clients », explique F. Souèges, en charge de la mise en place de ce logiciel qu’il est allé récemment présenter à Micropolis. Autrefois, le coût d’un produit était déterminé après sa conception. Aujourd’hui, nous le prenons en compte dès le début de sa mise en forme.»
Le prix de revient se définit en parallèle avec l’élaboration du projet. Ce qui s’appelle « design to cost ».
Blouses bleues et blanches
«Tout est imbriqué des le départ», indique Bruno Tracco, directeur de l’entreprise pontissalienne, «c’est le mélange des blouses bleues et des blouses blanches. Les équipes sont pluridisciplinaires dès la première heure.»
Le marketing et l’analyse fonctionnelle passent par le filtre de TDC Need, la phase de production étant gérée par un système AMDE de gestion des risques, AMDEC produits et AMDEC fabrication.
Le zéro risque n’existant pas, le plan d’investissement intègre ce risque.
Cet outil permet en outre de faire des économies de prototypes, remplacés par des simulations. D’ou économies de temps. «Le produit qu’on mettait trois ou quatre ans à créer, nous pouvons le sortir maintenant en six mois.» En outre, le processus «conception-besoin» s’est inversé en « besoin-conception ».
Réactivité et qualité
Faut-il en déduire qu’un summum de performance de ces cerveaux informatiques leur permette de tout produire, y compris l’idée géniale ? Ne nous énervons pas. «Le système n’a qu’une fonction structurante et n’est pas près de remplacer totalement l’homme», constate M. Tracco.
L’innovation n’est pas sans répercussion sur la stratégie de l’entreprise. Les carburateurs de motocycles sont un marché sur la fin. Les scooters partent en Chine. «Nous avons manqué certaines associations il y a dix ans.»
En revanche, le marché de la pièce de rechange marche bien sur l’Afrique, grâce à la rapidité de livraison. Et les recherches portent sur des pompes pour l’automobile et des détendeurs pour le gaz dans une optique de développement durable et de qualité où il est encore possible de rivaliser avec les industries émergentes.
Avec Knowllence, l’optimisation informatique
L’entreprise de Goux-les-Usiers conçoit une nouvelle génération de logiciels d’aide à la conception et à la fabrication de produits. Une grosse mais discrète ferme comtoise au coeur du Val d’Usiers, pas facile à trouver. L’entreprise ne reçoit pas ses clients, elle les visite ou communique par Internet.
Thierry Beaujon a créé sa société d’édition de logiciels à la sortie de l’école d’ingénieurs, il y a dix-sept ans. Il est maintenant entouré sur place d’une dizaine de personnes, dont son épouse Sandrine, responsable marketing et sept concepteurs, cinq autres salariés étant répartis sur la France pour la vente et le suivi. La société est le seul éditeur de logiciels industriels dans le Haut-Doubs.
Knowllence, qui affiche un chiffre d’affaires d’un million d’euros, travaille à 50 % pour l’automobile, mais aussi pour l’aéronautique, le médical, le nucléaire pour AREVA, les transports dont Airbus ou encore des laboratoires pharmaceutiques, notamment suisses.
Plus proches, Parkeon (parcmètres) à Besançon, Gurtner, Schrader (pour le bouchon d’essence de la C4 Citroën) ou encore Fabi à Morteau figurent sur la liste des clients. « Nous entrons également dans le monde local de l’horlogerie ». La société est partie prenante dans le projet de pôle de compétitivité Véhicule du Futur.
Ouverture vers l’international
«Nous mettons à disposition des entreprises des outils informatiques comme TDC Need, qui permet une analyse fonctionnelle des méthodes et des besoins, et AMDEC qui intervient sur la production et la fabrication», explique Thierry Beaujon. Des outils qui ont l’avantage d’apporter de la cohérence dans le processus de conception et de fabrication. «Et la rapidité, car la pression est de plus en plus forte sur les délais.»
Bien sûr, pas de développement possible sans se tourner vers l’international. « Nous y avons été incités pour accompagner des clients de multinationales. Comme Général Electric pour la fabrication de gros scanners. Et nous nous tournons vers l’Inde, un marché plus mature que celui de la Chine et plus proche de nous culturellement. »
L’EST REPUBLICAIN – Pages PONTARLIER – vendredi 1er Décembre 2006
Article reproduit avec l’aimable autorisation de Mme Danielle ROBERT