Interopérabilité ?

Conception Intégrée, interopérativité des méthodes : AF, QFD, AMDEC dans le cadre du projet de recherche PIRAMID.

Copyright 1999
Carmen Martin, Jean-Claude Bocquet – Laboratoire Productique Logistique – (Thèse à l’ADEPA)
Ecole Centrale – Paris Grande Voie des Vignes – 92295 Châtenay-Malabry (France)

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Résumé

La richesse et l’efficacité des recherches en productique ont permis de mettre au point un grand nombre d’outils utiles au concepteur pour appréhender les différentes phases de son projet. La question n’est donc plus maintenant de savoir si les outils existent mais concerne plutôt la bonne utilisation de ceux-ci.

L’intérêt de ce papier est de prouver qu’une interconnexion entre ces outils peut être trouvée dès les premières phases de la création du produit permettant ainsi de réduire les temps de conception. Nous cherchons également à démontrer l’utilité de cette recherche de continuité pour éviter des répétitions de tâches, coûteuses en temps, provoquées par une dissociation complète des outils et des résultats que ceux-ci sont susceptibles de fournir. Cet article vise également à mettre en évidence que l’intégration dans une seule et même boîte noire des différents outils est plus efficace en terme de complétude des informations générées et recueillies que l’addition des résultats issus des outils pris séparément.

L’intérêt de ce travail réside dans le développement d’une plateforme multi-outils dont le but est la minimisation des temps de conception par une exploitation plus judicieuse des données provenant des outils à la disposition des concepteurs.

Abstract
The wealth and efficiency of CIM research have made possible to finalise a lot of tools which are very useful for a designer to treat the various phases of his project. Now the question is not to know whether the tools exist but rather how to make most of them.
The relevance of this paper is to prove that an interconnection between these tools can be found during the first creation phases of the project, which permits to reducer the design duration. We have also tried to demonstrate the usefulness of this research for continuity in order to avoid that costly tasks caused by a complete dissociation of tools from expected results can be presented from happening. The aim of this article is to bring to the fore that the integration in a simple « black box » of the various tools in more efficient far as the completivess of the data obtained and collected is considered, than the sum of the result of separate tools.
The relevance of this work lies in the development of a multi-tool platform whose aim is to minimise design duration through a more judicious exploitation of the data obtained from the tools put at the designers’ disposal.

 

1. Introduction à l’interopérabilité des méthodes de conception intégrée

Le travail ici présenté fait partie d’un projet intitulé PIRAMID (Platform for Information Re-use Among Methodological tools In the product Development), qui s’intègre dans le cadre du programme européen Eurêka soutenu en France par le Ministère de l’Industrie et l’ANVAR. Les partenaires français de ce projet sont : Matradatavision, TDC, Logicom et l’ADEPA.

Ce projet a comme objectif d’offrir une meilleure organisation du processus de conception par la réalisation d’une plateforme devant servir de base commune à tout projet en période de gestation [4]. La multiplicité des outils développés au cours de ces dernières années et de leurs objectifs distants rendent le travail du concepteur difficile pour sélectionner les supports méthodologiques nécessaires à l’optimisation de son projet sur le plan organisationnel comme sur le plan du produit qu’il développe.

Notre travail est une contribution à ce projet car l’intégration proposée resterait incomplète, sans l’interoperabilité des différents outils. Parmi la multitude d’outils disponibles sur le marché actuel, nous avons voulu centrer notre intérêt sur ceux pouvant s’intégrer dans un macroprocessus basé sur la volonté de considérer trois points de vue complémentaires :

  • L’aspect fonctionnel, traité avec la méthode de l’analyse fonctionnelle, et qui traduit les besoins exprimés voire attendus par le client en spécifications techniques, sous forme de fonctions.
  • l’aspect technique considérant les diverses solutions susceptibles de répondre au besoin précédemment exprimé et utilisant la méthode QFD (Quality Function Deployment ) qui contribue dans ce cadre à l’évaluation des choix effectués
  • l’aspect fiabilité des produits étudié à travers la méthode AMDEC (Analyse des Modes de Défaillance de leurs Effets et de leur Criticité)

Nous proposons d’abord dans ce papier une structuration du domaine du processus de conception du produit Nous décrirons ensuite chacune des méthodes énoncées précédemment . Dans un troisième temps nous montrerons les liens entre méthodes et les différentes logiques d’enchaînement.

 

2. Approche standardisée de la représentation des méthodes de conception : interopérabilité ?

Une démarche actuelle permettant de mieux cerner le processus de conception est de décomposer celui-ci en différents domaines faisant apparaître les objets manipulés, les techniques utilisées et les objectifs à remplir, comme par exemple celle que nous permet d’étudier le processus de conception selon une division en trois champs : la conception, l’intégration et la communication. Chacun de ces champs peut être étudié d’un point de vue de ses objets manipulés, ses techniques utilisées et ses objectifs à remplir concernant les différents processus de conception.

Cette manière d’appréhender le problème nous a semblé robuste et nous avons donc décidé de l’utiliser dans nos travaux. On pourra lire dans [8] en particulier que le processus de conception s’intègre dans un cadre qu’il est possible de subdiviser en deux parties, l’une abordant les problèmes intrinsèques à la conception du processus l’autre s’attachant aux stratégies de son pilotage et de sa gestion. La première subdivision (la seule qui nous intéresse ici) est circonscrite par la réponse à trois interrogations majeures : Que concevoir ?, Comment concevoir ?, Pourquoi concevoir ?.

L’aspect le plus épineux et celui sur lequel nous voulons nous focaliser est sans conteste celui qui permettra de s’interroger et d’apporter des réponses sur les façons de concevoir. Pour affiner encore la granularité de l’étude, nous distinguerons dans le « comment concevoir  » les outils, les activités et les méthodes.

Nous tenons à faire la distinction entre outils et méthodes en considérant qu’une méthode peut utiliser des outils ou déboucher sur la mise au point d’un outil qui sera utilisé tel quel. L’outil a un caractère plus concret et pour ainsi dire plus physique qu’une méthode qui brasse données, supports et modèles selon des principes et des règles moins palpables.

Une activité peut être considérée comme un processus élémentaire de transformation de données entre une entrée et une sortie. En conception, les activités se comportent dynamiquement, c’est-à-dire, que les données sont une fonction du temps (temps de conception).

Dans l’étude des méthodes et des outils de conception nous nous limitons volontairement à l’examen de ceux appliqués au produit à concevoir que l’on dissocie des méthodes projet pour lesquelles le lecteur trouvera plus de détail dans [6] Ce point de vue méthode est capital dans le projet PIRAMID puisqu’il conditionne la suite du travail. Pour chacune des méthodes qui vont suivre (A.F., QFD, AMDEC), nous présentons un synoptique original de celles-ci résumées sous forme synthétique par des fiches utilisant la « bête à corne  » comme mode de représentation. L’objectif de ces fiches est double. D’une part elles apportent une vision globale de la méthode sous les points de vue suivants : A qui rend-elle service ?, Sur quoi agit-elle ?, Dans quel but est-elle appliquée ?, Quelles sont les données d’entrée et de sortie de la méthode ?, Quels sont les éléments dont nous avons besoin pour la mettre en pratique ?

D’autre part, elles doivent permettre d’identifier rapidement la nature des données susceptibles de servir à l’enchaînement des méthodes entre elles pour permettre la réalisation d’une plateforme de travail multiméthodologique.

 

3. Approche fonctionnelle et par activité des principales méthodes de conception.

Les méthodes de conception que nous allons commenter et celles considérées comme représentatives dans le projet PIRAMID sont : l’analyse fonctionnelle, le QFD, et l’AMDEC. Cette liste n’est pas exhaustive et l’on pourrait également s’attacher à la description d’autres méthodes également largement utilisées comme la conception à coût objectif ou les approches qualité TQM (Total Quality Management), TQC(Total Quality Control). Mais le but visé n’est pas ici l’exhaustivité mais le principe d’action que nous cherchons à mettre en évidence.

3.1. L’analyse fonctionnelle (AF, CdCF)

Cette méthode permet de parvenir à une optimisation du produit du point de vue de la satisfaction de son utilisation. Le produit se situe dans un environnement avec lequel il interagit, et il est alors considéré comme un système. La méthode considère alors ce système d’un point de vue de sa finalité, et met en évidence la qualité d’un produit par l’expression de son usage.
Les principes de la méthode, comme nous pouvons lire en [2], [7] et [9] sont la matérialisation du produit et la mise en évidence de ses composants fonctionnels.
Son application se déroule en trois étapes : expression et description du besoin, définition des fonctions attendues, établissement des blocs-diagrammes fonctionnels.
L’expression du besoin se traduit dans le vocabulaire du produit par la notion de fonction. Trois types de fonctions sont utilisés par la méthode : les fonctions principales, les fonctions contraintes et les fonctions de conception.
La fiche synthèse de la méthode, répondant aux questions formulées précédemment apparaît sur la Fig.1 ci-dessous.

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Figure 1 : Représentation synthétique de l’Analyse Fonctionnelle

Le déroulement de cette méthode implique de passer par les phases suivantes : Délimitation du milieu extérieur, Détermination des phases d’utilisation, Formalisation du besoin, Contrôle de validité.
La phase de caractérisation du besoin et du contexte d’utilisation du produit est primordiale puisqu’elle conditionne la mise en place de ses fonctions. L’analyse fonctionnelle sera ensuite d’autant plus simple que le besoin exprimé est clair. Le choix de l’architecture finale sera déduit par optimisation du degré de satisfaction global de l’ensemble des fonctions du produit.

3.2 Le QFD

La méthode QFD (Quality Function Deployment) permet de cibler les justes paramètres nécessaires pour satisfaire le client, travailler sur la qualité perçue et découvrir tôt dans le cycle de déroulement du projet les points sensibles pour lesquels des mesures préventives pourront et vraisemblablement devront être prises.
D’après les travaux de [1], [3], et [5] cette méthode permet de répondre à trois questions : quelles sont les attentes clients à considérer en priorité pour assurer la réussite commerciale du produit ? , Quelles sont les réponses techniques à privilégier ? Et quelles sont les difficultés potentielles du cycle de développement de produit ? . La réponse à ces questions est apportée par une équipe projet formée de personnes complémentaires réunies autour de la problématique à solutionner.
Comme son nom l’indique la méthode s’appuie sur un déploiement de matrices. La méthode QFD ne peut être déroulée sans définir préalablement les objectifs, qui sont différents selon le contexte et le résultat attendu : développement du produit et mise en œuvre du service, fiabilisation d’une réponse à appel d’offres, analyse de satisfaction, mise en place d’une nouvelle organisation,…
La fiche synthèse de la méthode est représentée sur la Fig. 2.

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Figure 2 : Représentation synthétique du QFD

Le QFD est mené surtout en phase amont d’un nouveau projet, à un stade où le large éventail de choix est encore possible. La démarche consiste à traduire la voix du client dans le langage des ingénieurs de développement. Les principaux éléments à prendre en compte dans ce cadre sont alors : Les critères de valeur du produit, les enquêtes marketing, les matrices relationnelles, la sélection des paramètres critiques.

3.3. Les études de risques avec l’ AMDEC – FMEA

L’AMDEC utilise les caractéristiques d’un produit permettant d’instaurer un dialogue entre plusieurs entités de l’entreprise comme le bureau d’études, les services de design, les personnels chargés de la réalisation, de l’industrialisation, de la commercialisation, de la maintenance, du service après-vente,… en prenant en compte plus précisément le triptyque produit-procédé-processus. Des nombreux auteurs ont écrit sur cette méthode et nous soulignons les travaux de [2] qui nous montre que l’analyse des modes de défaillance de leurs effets et de leur criticité (AMDEC) doit permettre au groupe d’anticiper d’éventuels aléas. Cette réflexion conduira naturellement aux solutions techniques ou organisationnelles destinées à faire disparaître ou tolérer les modes de dysfonctionnement potentiels.
L’AMDEC constitue donc un système extrêmement puissant d’aide à la conception des systèmes. L’AMDEC permet de déterminer les points faibles d’un système et d’y apporter des remèdes, de préciser les moyens de se prémunir contre certaines défaillances, de faire dialoguer les personnes concernées par un projet, mieux connaître le système, et principalement d’étudier les conséquences de défaillance vis-à-vis des composantes majeures de la sûreté de fonctionnement : fiabilité, disponibilité, sécurité, maintenabilité,…
Les principales phases d’application de la méthode sont représentées dans la Fig. 3.

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Figure 3 : Représentation synthétique de l’AMDEC

 

4. Liens entre AF, QFD et AMDEC

Le présent paragraphe va s’attacher à mettre en évidence une représentation permettant de définir des liaisons entre les méthodes de conception que nous avons précédemment décrites. L’objectif est de définir une plateforme de conception guidant le concepteur dans son travail et de faciliter l’interopérabilité entre les méthodes. La connaissance des méthodes et leur situation sur l’échiquier du développement permettra en effet d’orienter la conception en disposant des fils conducteurs conduisant à la définition du produit.
Les méthodes de conception que nous avons présentées tendent à se vulgariser et font désormais partie de la « boîte à outils  » des personnes en charge des études de définition. Notre volonté n’est donc pas ici de les commenter davantage. En revanche, les liens permettant de passer d’une méthode à une autre (interopérabilité) sont mal définis et le concepteur ne dispose pas à l’heure actuelle d’une vision globale et panoramique de la disposition de ces méthodes dans la chronologie des tâches de développement. Un travail de mise en évidence des relations intimes ou au contraire marginales entre les méthodes permettrait donc d’améliorer certainement la rentabilité et l’efficacité du processus de conception.
Sans vouloir présager des résultats potentiels, il semble que le chantier en cours, objet du projet PIRAMID et dont les prémisses sont discutées ici sera bénéfique à deux niveaux.
D’une part il devrait faciliter le travail du concepteur qui aura une vue plus détaillée de l’enchaînement des opérations. La succession des tâches devrait en effet être en partie déduite des relations établies entre les méthodes et de la caractérisation des objectifs liés à leur emploi.
D’autre part, il devrait contribuer à augmenter la complétude du processus de conception par une meilleure intégration des données et contraintes issues des services aval à la définition du produit (méthodes, fabrication, maintenance, contrôle, client, …) mais aussi par une prise en compte accrue des spécifications mentionnées au niveau des cahiers des charges.
A ce stade nous pouvons assurer que l’expression de la logique de liens entre les données susceptibles d’être échangées entre les différentes méthodes va donner une robustesse au processus de conception. Les liens entre méthodes, contribuent ainsi à fiabiliser ce processus de conception. Dans ce papier on s’intéresse à l’aspect macroscopique de l’enchaînement des méthodes, donc à la mise en place des flux qui les traversent. Il ne précise pas la nature exacte des données les constituant. Ce travail est en cours et il fera l’objet de futurs résultats.

4.1. Le processus de conception et l’interopérabilité

La définition d’un bien ou d’un service nécessite de véhiculer un nombre important de paramètres. Ces paramètres peuvent dans la majeure partie des cas prendre plusieurs valeurs ce qui conduit naturellement à la définition de variables de conception. Les méthodes associées au processus de développement et plus particulièrement celles utilisées lors de la définition du produit s’appuient sur des données initiales ou issues de traitements précédents pour instancier elles-mêmes les variables qu’elles manipulent et, ce faisant, les transformer en données réutilisables par la suite. La Fig. 4 représente ce phénomène en cascade.

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Figure 4 : Séquencement des méthodes de conception

L’idée initiale à l’origine d’un projet fait l’objet d’une étude de faisabilité technique et commerciale qui, dans l’hypothèse d’une issue favorable, conduit au démarrage du processus de conception. Le processus véhicule des informations représentées sous forme de champs de données Di. Chaque champ Di est un vecteur colonne dont les composantes sont les données élémentaires dkij où k sert à l’identification de la donnée, i représente le numéro du champ et j désigne l’étape du processus ayant permis l’instanciation de la variable et sa transformation en donnée. Les champs des variables Vi intègrent la représentation au niveau de l’outil dont l’exploitation nécessitera la connaissance des variables concernées. Chaque champ Vi est également un vecteur colonne. Ses composantes sont les variables élémentaires vki où, selon la même symbolique, k permet d’identifier la donnée et i correspond au numéro de la méthode qui la requiert pour le traitement.
De même qu’un enchaînement purement séquentiel, nous pouvons envisager une parallèlisation totale, comme celle représentée dans la Fig. 5

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Figure 5 : Parallélisme des méthodes de conception

Cette nouvelle configuration considère que les méthodes sont dédiées et indépendantes les unes des autres. Les champs de données Di qui les approvisionnent peuvent en revanche s’intercepter. Deux méthodes peuvent en effet nécessiter des données partiellement semblables pour délivrer les résultats attendus après un traitement approprié. Mais dans ce type de disposition il apparaît clairement que les méthodes sont exploitées de manière autonome en s’affranchissant des conclusions tirées de l’exploitation des autres outils parallèles. En final, chaque méthode délivre un champ de résultats correspondant à une partie Si (i représentant le numéro de la méthode) du cahier des charges de conception.

Dans l’esprit de beaucoup de « spécialistes  » c’est ainsi que doit être abordée la démarche de conception (strictement séquentielle, strictement parallèle). Les méthodes sont généralement considérées selon les spécificités qui les caractérisent sans tenir compte de l’origine des données nécessaires à leur utilisation. Ces dernières sont la plupart du temps sensées être connues et la question de leur origine n’est pas souvent posée. La réflexion se situe principalement au niveau de l’apport de la méthode sur le cahier des charges de conception.

Les méthodes sont essentiellement décrites par leur valeur ajoutée, et font peu référence à la disponibilité des données qu’elles utilisent, c’est pourtant cette disponibilité qui conditionne le processus de conception. Ce type de raisonnement débouche sur les flux hybrides du type de ceux de la Fig. 6.

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Figure 6 : Disposition hybride des méthodes de conception

Les chemins conduisant à la définition d’un cahier des charges de conception sont complexes et mettent en jeu des mécanismes de réflexion qu’il est difficile de décrypter. A travers l’utilisation d’une méthode particulière, le concepteur se base le plus souvent sur des résultats implicites fruits de traitements intellectuels assimilables en soi à des méthodes. Interpréter et traduire le cheminement de la pensée ayant conduit au choix des spécifications est d’autant moins évident que la diversité des projets, le nombre non négligeable des méthodes et la « mollesse  » des données (tout n’est pas quantifiable) compliquent l’exercice. Comme on peut le voir sur l’exemple de la Fig. 6 l’agencement des méthodes est tel que celles ci peuvent se combiner selon des modes distincts. La contribution à l’approvisionnement du cahier des charges peut nécessiter l’utilisation de méthodes enchaînées ou séparées. Le traitement de l’ensemble des ramifications horizontales de l’arborescence mise à jour mène à l’établissement de spécifications partielles. Ces spécifications peuvent se contredire selon les objectifs poursuivis au niveau considéré. Un traitement ultime intégrant des notions de priorité permettra alors d’aboutir à un cahier des charges de conception lissé combinant au mieux l’ensemble de toutes les contraintes et débouchant sur un produit final optimal.

C’est par le traitement de l’indépendance de l’utilisation de telle méthode ou de tel enchaînement de méthodes que l’on peut paralléliser sur l’exemple de la Fig. 6, par exemple que la méthode 5 est indépendante de l’enchaînement des méthodes 1,2 et 3, ou bien dire que la méthode 4 est indépendante de la méthode 1.

4.2. Schémas directeurs et principes méthodologiques

La complexité de mise en place de la cartographie de méthodes dont nous avons parlé jusqu’alors requiert de s’appuyer sur une méthodologie générique adaptable à tout projet de développement. Ce travail est-il viable ? Rien n’est moins sûr. En effet, les spécificités attachées aux différents projets rendent chacun d’eux unique. La généricité de la méthodologie devra donc être suffisante pour s’approprier les paramètres propres caractérisant le projet. Le travail devra consister à mettre tout d’abord en évidence une typologie de projets à partir de l’observation de plusieurs combinaisons possibles dans l’ordre d’enchaînement des méthodes. La liste des méthodes utilisables dans le projet sera dressée. Elle n’est pas limitative et peut aller au-delà des méthodes déclarées (AMDEC, QFD, Analyse Fonctionnelle).
L’identification du positionnement des méthodes de conception devra nécessairement s’appuyer sur la notion de données transférées. C’est donc à ce niveau que le travail amont de description détaillée des outils, objets des fiches du paragraphe précédent, prend tout son sens.
Le développement d’un produit optimal requiert de s’interroger sur un ensemble de paramètres liés au produit et caractérisant son utilisation bien sûr, mais aussi son mode de fabrication ou de contrôle, son entretien et la totalité des étapes se succédant dans le déroulement de son cycle de vie. L’ensemble de ces questions va nécessiter l’utilisation de méthodes dédiées permettant d’appréhender les paramètres importants. La méthodologie consiste donc à partir du produit ou du projet et par un zoom arrière adapté à remonter dans un premier temps aux données vitales et par déduction logique d’associer dans un deuxième temps les méthodes permettant leur obtention.
Dans la suite, nous allons représenter de façon qualitative, la différence des résultats obtenus à partir de deux enchaînements de méthodes différents :
Dans le premier cas, nous allons traiter le problème de la conception d’un produit, avec la seule méthode QFD. Comme nous l’avons expliqué précédemment, cette méthode nous offre un éventail des possibles solutions techniques satisfaisant les différentes fonctionnalités du produit. La complétude des résultats sera fragilisée par l’isolement provoqué par l’utilisation d’une méthode unique.
Dans le second cas, nous proposons un enchaînement de méthodes plus complet.
Dans ce cas, nous appliquons aussi la méthode QFD, mais elle est précédée d’une AF qui va nous assurer que la solution technique que la méthode QFD nous apporte, s’adapte au mieux aux besoins des clients, formalisés grâce à cette méthode sous forme des fonctions. Nous faisons également, une étude de marché afin d’étudier la place de nos produits parmi ceux de la concurrence. Enfin la réalisation d’une AMDEC, nous permettra de prévoir les causes de défaillance de notre produit.
Cet exemple montre que si l’on part de la base qu’une méthode verrouille en termes de qualité, un champ réduit du produit (par exemple : l’AF verrouille l’usage, l’AMDEC verrouille le risque et le QFD verrouille les technologies), utiliser une seule méthode ne sert à verrouiller qu’un seul point de vue.

 

Conclusion sur l’interopérabilité des méthodes de conception intégrée

En partant de l’observation qu’aujourd’hui, aucune méthode n’est réellement complète pour couvrir les différentes phases, depuis l’analyse des besoins jusqu’à la fabrication du produit, l’idée d’une approche intégrée, associée à la mise en place de procédures adaptées de conception et d’industrialisation de produits pour profiter des savoir-faire de l’entreprise, est l’élément innovateur du projet PIRAMID.

Les caractéristiques intrinsèques de chaque méthode délimitant leur cadre d’action avec une assez grande précision, un travail de mise en relation devra intégrer les notions de données à transférer et données attendues en fonction du niveau d’avancement atteint dans le déroulement du processus de conception Ce travail d’analyse sera déduit de la mise en application d’une méthodologie déterminée donnant accès à la représentation dynamique du changement d’état des techniques de conception.

Néanmoins, la diversité des projets et des produits rend les études distinctes et complique la mise en œuvre d’une plateforme de développement unique. Un important travail d’analyse doit donc d’abord être mené pour capter les éléments spécifiques au projet en cours et adapter le panorama et l’enchaînement des méthodes et outils en conséquence.

copyright 1999

Bibliographie

[1] J.-C. Bocquet, B. Duffau.- La gestion du changement : de la gestion de production à la gestion de conception. L’art du management. 1997, pp. 626-631, V. Mondiale[2] J.-C. Cloarec.- Analyse fonctionnelle ou la préparation de l’AMDEC. Maintenance & Entreprise, 1993. Vol.466, pp. 20-22[3] C. Chuen-lung, Stanley F. Bullington.- Development of a strategic plan for an academic department through the use of QFD Computers & industrial engineering, 1993. 25, 1-4, pp.49-52[4] Djeapragache, V. Aumont, A. Laville, T. Beaujon.- Une plateforme destinée à concevoir pour bien fabriquer et capitaliser le savoir-faire. Consortium PIRAMID. MICAD-1998[5] W. Eversheim, W. Bochtler, R. Gräbler, W. Kölscheid.- Simultaneous management for concurrent engineering, European Journal of Operational Research. 1997. Vol. 100, pp. 327-337[6] C. Foure, J. Bernard-Bouissieres.- Orchestrer les appuis méthodologiques dans un projet. Travail et Méthodes, 1996. Vol. 529, pp. 23-29[7] D. Lefebvre.- Expérience industrielle dans l’association du QFD, de l’analyse fonctionnelle et de l’analyse de la valeur. La valeur, 1997, Vol. 73, pp. 2-7[8] C. Martin.- Elaboration de méthodes et d’outils d’aide à la gestion du processus de conception intégrée. Premier rapport bibliographique. CER 98-07. 1998. Ecole Centrale Paris. Laboratoire Productique-Logistique[9] A. Puttaert.- L’analyse de la valeur, méthode clé de reconception des produits et des processus administratifs dans le domaine des services. Cahiers de la documentation, 1994, 2 pp. 39-42

 

 

Congrès Primeca. La Plagne (3-5 avril 1999)

Pour en savoir plus sur les résultats de nos recherches

La Suite méthodologique TDC (devenu Robust Engineering Suite en 2015)
En résultat de ce programme de recherche PIRAMID, nous vous proposons depuis 2005 des versions régulièrement mises à jour:

Logiciels méthodologiques en conception

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